Tadashi Abe est né en 1926.
Il est originaire d’une famille proche de la Cour Impériale Japonaise. Son père, élève d’Ueshiba Sensei, est un riche homme d’affaires qui possède plusieurs mines en Corée et réserve une partie de ses richesses pour le Kobukan Dojo.
Naturellement ce dernier incite son fils à étudier avec le Maître. C'est donc à l’âge de 16 ans que Tadashi débute l'Aïkido à Osaka, en août 1942. Plus tard, dans le but de se former directement auprès du fondateur, il devient uchi deshi à Iwama.
Durant la seconde guerre mondiale, il est officier de marine de l’armée Impériale. Tadashi est membre de l’escadron de kamikaze qui pilote des sous-marins torpille avec mission de se jeter sur les navires américains ; et ne doit son salut qu’à l’arrêt du conflit…
En 1952, après plusieurs années de pratique auprès du fondateur, il est nommé 6ème Dan.
Après l'obtention de son diplôme en droit à l’université de Waseda, Morihei UESHIBA décide de l’envoyer en Europe, avec pour mission de continuer le travail d’implantation de l’Aïkido, débuté un an plus tôt par Minoru MOCHIZUKI.
Alors âgé de 26 ans, Tadashi ABE part s’installer à Paris et y étudie, en parallèle, le droit à la Sorbonne. Représentant officiel du Hombu Dojo, il enseigne l’Aïkido dans le dojo de Judo de Maître Mikinosuke KAWAISHI. Ce dernier l’aide dans sa tâche et lui conseille de codifier les mouvements sous forme de séries pour adapter l'apprentissage de l'Aïkido aux esprits européens.
De 1952 à 1960, il suit méthodiquement ce conseil et développe une approche “rationnelle” des techniques. Sa pratique est linéaire, très axée sur la défense. L’enseignement de Maître ABE est très dur (il blesse parfois des personnes), mais il est particulièrement apprécié des judokas, dont plusieurs milliers se «convertiront» à l’Aïkido.
Surmontant de nombreuses difficultés, il parvient à développer l’Aïkido en France et en Europe. Durant cette période, il effectue de nombreux voyages en Belgique, en Italie, en Suisse et au Royaume-Uni, notamment, pour aider Kenshiro ABBE dans le développement de l’Aïkido dans ce pays.
Il est également l’auteur de deux ouvrages traduit en français par Jean ZIN (4e dan de Judo - 3e dan d'Aïkido à l’époque) : « L'arme et l'esprit du Samouraï japonais » paru en 1958 et « La victoire par la paix » paru en 1960. Ces deux livres contiennent des centaines de photos techniques révélant un art plus semblable à l’Aïki-Budo qu’a l’Aïkido « moderne ».
En 1960, après huit années de travail en Europe, il décide de retourner dans son pays, considérant sa mission accomplie. Avant de quitter la France, il décerne le quatrième dan à son élève, André NOCQUET, qu’il charge d’assurer la relève. Il laisse plusieurs milliers de pratiquants en France, avec parmi eux de nombreuses ceintures noires.
A son retour au Japon, devant les dirigeants de la fondation Aikikai réunis pour lui décerner son 7ème dan, il prononce la déclaration suivante : « Je refuse ce grade. Je reçois mes dan du fondateur et non d’une Fondation. L’Aïkido que j’ai appris avec O Sensei était un budo. Depuis mon retour au Japon, je m’aperçois que ce que l’on enseigne ici aujourd’hui n’a plus rien à voir avec cet art martial. Je n’ai plus rien à voir avec vous. Je vous rends mon menjo, certificat de mes grades. »
Déçu par l’évolution de l’Aïkido, il reproche au Hombu Dojo de pratiquer un « sport de femmes », refuse son grade de 7ème Dan et décide de quitter l’Aïkikai.
Tadashi ABE fut le pionnier de l'Aïkido en Europe et en France plus particulièrement. Il fut le premier professeur à vivre et enseigner sur une longue période en occident. Homme peu banal, il se démarquait par son caractère guerrier et sa pratique très martiale. Respecté pour sa technique et ses engagements, il avait une très haute estime de l’Aïkido et du fondateur, dont il portait toujours une photo sur lui…Très talentueux, il avait aussi un sérieux penchant pour l’alcool et le combat…
Tadashi Abe décède le 23 novembre 1984, à l’âge de 58 ans.